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Compte rendu de l'ouvrage " Grandir entre adolescents" (Claire Balleys), Réveillé Jonathan, (https://lectures.revues.org/19576)

 

Dans ce livre[1], Claire Balleys, sociologue genevoise spécialiste des médias, propose de s’intéresser aux pratiques de sociabilité des jeunes adolescents, souvent méconnues et qui en font par conséquent un objet suscitant de nombreuses préoccupations, comme en attestent les questions des adultes qu’elle cite en début d’ouvrage : « Pourquoi les ados sont-ils si narcissiques ? », « Pourquoi s’exhibent-ils sur internet ? », A-t-on à faire à une nouvelle race de jeunes ? » (p.11)… Autrement dit, l’auteur fait le constat que « la population adolescente ne bénéficie pas toujours d’un regard bienveillant de la part de adultes » (p.11)

Ainsi, Claire Balleys propose un contrepoint sociologique aux préoccupations des adultes en l’étayant d’une enquête, qualifiée d’« exercice d’immersion sociologique » (p. 13) parmi une population d’élèves genevois inscrits dans l’un des trois établissements de l’enseignement secondaire retenus par l’auteur. À l’appui d’un terrain à triple entrée[2] réalisé dans le cadre de son travail de thèse[3], l’auteure propose à ses lecteurs (parents, éducateurs, chercheurs en sciences sociales,…) de « faire un petit plongeon dans l’univers adolescent tel qu’il s’expérimente aujourd’hui » (p.12), à l’école et sur les réseaux sociaux, afin de saisir les sociabilités des jeunes entre eux, dans leurs rapports directs et médiatisés. Pour ce faire, elle s’appuie sur un solide terrain d’investigation composé d’entretiens collectifs menés auprès de six classes différentes et des observations participantes lors d’activités de loisirs (séjour en camp, séances de répétition d’une pièce de théâtre) au cours desquels un carnet de terrain a été tenu. Par ailleurs, un suivi original des échanges adolescents sur internet a été réalisé par le biais d’une consultation et d’un suivi régulier de blogs d’élèves. En tout,  deux classes de trois collèges genevois ont fait l’objet d’une enquête approfondie de la part de l’auteur qui a tenu compte également des caractéristiques scolaires et sociales de chaque établissement. Ainsi, en développant son analyse sur un aspect de l’expérience juvénile peu étudié par les chercheurs en sciences sociales, à savoir « la force des liens d’amitié et d’amour entre adolescents et leur rôle fondamental dans la construction identitaire et l’acquisition de l’autonomie » (p. 13), Claire Balleys réfute les idées reçues sur la jeunesse et dresse un portrait complexe des sociabilités adolescentes.

Après un retour historique sur la notion d’adolescence[4], les idées développées dans l’ouvrage se structurent principalement autour des trois chapitres centraux qui développent chacun un éclairage précis sur une dimension de la sociabilité adolescente. Dans le chapitre 3 intitulé « La négociation quotidienne du prestige », Claire Balleys cherche à « déconstruire la hiérarchie interne de la classe » (p. 74) en dévoilant les processus d’attribution du prestige adolescent. S’appuyant sur les travaux de Pierre Bourdieu, Claire Balleys explique que ce prestige s’acquiert par l’exercice d’un pouvoir symbolique, caractérisé par une certaine invisibilité et un « processus interactif » (p. 75) impliquant dominants et dominés. Dans les entretiens avec les adolescents transcrits par l’auteure, on s’aperçoit d’ailleurs que, « bien que la popularité ne soit pas débattue explicitement » (p. 37), chacun est capable de positionner les membres de sa classe (y compris lui-même) selon cette grille de lecture. Sur la base de ces observations, l’auteure constate que le fait d’être capable de prendre la parole « de manière appropriée » (p. 37) est le critère prédominant permettant d’évaluer la popularité – et, par conséquent le leadership – d’un adolescent. Ce critère de la prise de parole s’exprime à travers deux dimensions : une dimension individuelle d’une part, puisqu’il s’agit de « savoir parler de soi, d’être capable de lier quelque chose de personnel et d’intime » (p. 40) et une dimension collective d’autre part, puisque ce « savoir parler » investit en retour l’adolescent populaire d’un rôle « de leader d’opinion, de porte-parole, de censeur, d’expert et de modèle pour ses camarades de classe » (p. 32).

Afin de mieux saisir ces logiques d’attribution du prestige, Claire Balleys reprend les catégories indigènes – les « gens de la classe », le « transparent », l’« intrus » – qu’elle a pu recueillir sur son terrain. Elle décrit en premier lieu les « gens de la classe » (p. 64), très visibles sur les différents espaces de sociabilité – physiques, amicaux, interactionnels – qu’ils sont les plus disposés à occuper. Parmi ces gens de la classe, deux figures apparaissent, l’expert et le boss, se distinguant par la manière dont ils font autorité auprès de leurs pairs : l’expert, démontrant qu’il sait « créer des liens forts » (p. 57), amicaux et amoureux, avec les personnes du sexe opposé ; le boss, suscitant quant à lui le respect par « les liens familiaux et communautaires » (p. 68) qu’il possède[5], valorisant les confrontations viriles en face-à-face tout en bénéficiant de l’appui des grands frères. À l’opposé, on distingue le « transparent », figure isolée qui ne participe pas aux échanges de la classe et se caractérise par son absence dans les espaces de sociabilité directe. Dans le même temps, l’analyse très fine de l’auteure permet de relever, chez ces transparents, des investissements intenses du côté de la sociabilité indirecte. C’est le cas de Solène, auteure d’un blog à succès, qui parvient à capter un lectorat sur internet sans que ceci impacte positivement sa sociabilité directe à l’école, si bien que, du point de vue de l’acquisition du prestige, Claire Balleys en déduit que la sociabilité directe précède la sociabilité indirecte, confirmant ainsi le poids du critère central de la prise de parole dans l’acquisition du prestige. L’intrus s’avère être une autre figure intéressante de la sociabilité juvénile car il correspond à des individus qui tentent de sortir de l’état d’invisibilité auxquels les adolescents populaires voudraient les voir confinés. Cette position d’intrus peut se révéler de deux façons chez les adolescents concernés : soit, comme dans le cas de Yann, par un défaut d’affiliation, c’est-à-dire une non-maîtrise des codes de sociabilité, qui s’illustre par exemple à travers une intervention jugée « maladroite » (p. 39) par les autres adolescents ; soit, comme dans le cas de Grégory, par un capital physique avantageux (une capacité à « faire grand »), potentiellement intéressant, mais qui s’avère impossible à faire reconnaitre socialement par les pairs, du fait précisément que ce capital, utilisé à bon escient par son détenteur, pourrait s’avérer concurrent pour « la clique des garçons leaders » (p. 74). L’espace relationnel adolescent est donc un espace concurrentiel faisant l’objet de luttes silencieuses dans lesquelles l’attribution du rôle de leader est le résultat d’un « processus interactif » (p.7 5) et non le seul fait de qualités individuelles.

Le chapitre 4 permet à l’auteure d’analyser la dimension collective du lien social, en particulier le fait que les liens sociaux adolescents sont d’autant plus gratifiants lorsqu’ils sont parvenus à un degré d’intimité significatif. Contrairement aux résultats de certains travaux de chercheurs américains, Claire Balleys explique que, pour les adolescents, la qualité du lien amical et amoureux est plus importante (et surtout plus prestigieuse) que la quantité de relations. Pour ce faire, les adolescents doivent sans cesse apporter au public de pairs des preuves tangibles[6] de leurs relations amicales et amoureuses qui font l’objet d’un « processus d’évaluation » (p.50). Dans le même temps, les adolescents (y compris les garçons) dépensent une part importante de leur temps à multiplier des marques d’affection à leur entourage, qui doivent sans cesse être réitérée pour entretenir des relations ténues. Dans ce contexte, le couple amoureux devient la situation la plus valorisante car elle est l’expression la plus manifeste du lien intime et, n’allant pas de soi, il démontre la capacité des adolescents à « faire grand » par rapport à leurs camarades de classe, par opposition aux attitudes de « gamin » (p. 85) citées de façon péjorative. Loin de se réduire à une relation intime entre deux individus, la relation de couple fait l’objet de discussions parmi les pairs qui prennent part au « déroulement de la trame amoureuse » (p. 79), suivie comme un feuilleton, notamment à travers les articles de blog postés quotidiennement. Le groupe de pairs constitue ainsi une « instance de légitimation du couple » (p. 84) qui, dans le même temps, est en mesure d’agir sur son devenir. À ce propos, l’auteure explique que la validation d’une telle union permet aux amis du couple de bénéficier en retour de rétributions symboliques indirectes. De ce fait, on saisit la force des mécanismes de gestion collective du lien qui régissent les sociabilités juvéniles, y compris dans les relations les plus intimes. Dès lors, Claire Balleys prend soin d’examiner une contradiction apparente qui se révèle à la lecture des cas exposés : Comment comprendre que les adolescents puissent « à la fois être dans la théâtralité » (p. 94) et prétendre « miser sur un registre exclusivement intime » (p. 94) ? Pour l’auteure, cette question revient à comprendre la double injonction des adolescents qui consiste à « être intime tout en affichant publiquement cette intimité » (p. 95). Sur ce point, l’expression « Toi-même tu sais », fréquemment rencontrée dans la transcription des échanges adolescents (articles et commentaires de blogs) de l’ouvrage, renvoie à cette idée qui consiste à « dire sans trahir ». Afin de résoudre cette double injonction, Claire Balleys approfondit son analyse en indiquant que la gestion de l’intimité et la notion de vie privée participent elle-même du phénomène de hiérarchisation interne des adolescents. En effet, le partage d’un secret, renvoyant à la confidence et à l’intimité, implique une « double logique, à la fois inclusive et exclusive » (p. 96). De ce fait, chaque adolescent est en mesure de se classer par rapport à « ce qu’il sait et ce que les autres ignorent » (p. 96) mais également en fonction du degré de prestige de son interlocuteur-confident. La maîtrise de la vie privée fait donc l’objet d’une attention particulièrement rigoureuse de la part des adolescents ; mais le statut de « meilleur ami » implique de se livrer de façon quotidienne et entière à son alter-égo et peut s’apparenter à une forme de contrôle social particulièrement exigeant.

Dans le chapitre 5 (« Grandir par le lien »), l’auteure revient sur la place des liens sociaux tissés entre adolescents dans « les processus d’exploration et d’expérimentation de soi comme individu » (p. 109). Ici, les relations amoureuses s’envisagent sur le modèle de l’amour romantique et correspondant, d’une part, à l’idée d’exclusivité évoquée plus haut et, d’autre part, au mythe de l’âme sœur qui souligne le sentiment d’incomplétude de l’individu célibataire. Claire Balleys précise également que, dans ce contexte, être amoureux permet d’être en conformité avec les impératifs de la sociabilité adolescente. Par ailleurs, le lien amoureux s’avère être une manière « de grandir et de se percevoir […] sous un jour nouveau » (p. 114) ; en effet, l’adolescence produit peu à peu des « autrui significatifs » différents de ceux des parents. Les relations amicales, quant à elles, peuvent s’envisager « comme une forme d’expérience exploratoire du sentiment amoureux » (p. 115) puisque, soit la relation à la meilleure amie peut se développer sur d’un schéma similaire à celui de l’amour romantique (exclusivité, jalousie, rupture), soit la relation amicale constitue une première expérience des relations mixtes.

Avec cet ouvrage, Claire Balleys apporte un éclairage original sur les relations entre adolescents, proposant à la fois des pistes de réflexions intéressantes pour les chercheurs en sciences sociales. Mais ce travail suscite l’intérêt des professionnels en contact avec des publics de jeunes puisque Claire Balleys met également en place de formation dans les écoles. Néanmoins, on peut regretter que Claire Balleys, tout en utilisant la notion d’affiliation, analyse prioritairement le prestige comme des « attributs contextuels et non intrinsèques à l’individu » (p. 34). On sait pourtant la notion d’affiliation se construit, comme le rappelle François de Singly, à partir d’un mixte entre les notions de socialisation et d’héritage, soulignant en cela la dimension à la fois horizontale et verticale de la notion. Or, en privilégiant dans son étude les relations horizontales, l’auteure ne s’interroge pas davantage, à propos des élèves leaders, sur ce qui fonde la légitimité de « leurs pratiques, leurs goûts, leurs attitudes » (p. 32). Dès lors, on peut se demander dans quelle mesure cette légitimité culturelle des adolescents leaders serait liée à la possession de capitaux spécifiques (culturels notamment), eux-mêmes inégalement répartis entre les élèves. Gageons qu’une enquête sur un temps plus long aurait conduit l’auteure de mettre en évidence ces liens, sans pour autant remettre en question les résultats très pertinents de ce travail.

 



[1] L’ouvrage est paru dans la collection « Le savoir suisse » des Presses polytechniques et universitaires romandes, qui a pour but de mettre à la portée d’un public élargi les travaux de chercheurs indépendants de l’édition.

[2] Les aspects méthodologiques de ce terrain à triple entrée – croisant entretiens collectifs en situation de réception, observation participante et ethnographie sur internet – sont détaillés dans la transcription écrite de la communication de Claire Balleys au Colloque Enfance et Culture en 2010, intitulée « Comment s’observe la sociabilité adolescente ? Une étude sur trois fronts », disponible à cette adresse : http://www.enfanceetcultures.culture.gouv.fr/actes/balleys.pdf.

[3] Pour consulter ce travail de thèse et les autres publications de Claire Balleys, on peut se reporter à l’adresse suivante : http://claireballeys.com/publications/.

[4] Dans cette enquête, Claire Balleys fait correspondre l’entrée dans l’adolescence et l’entrée au Cycle d’orientation (équivalent du collège en France) qui prend en charge des élèves dont l’âge est compris 12 à 15 ans. Elle justifie cette juxtaposition par le fait que « l’histoire de l’adolescence se déroule en parallèle à celle de l’école » (p. 15). Pour une réflexion approfondie sur les catégories éminemment politiques de jeunesse, d’adolescence, de post-adolescence (comme le rappelle Bourdieu dans un entretien « La jeunesse n’est qu’un mot » avec Anne-Marie Métailié, paru dans Les jeunes et le premier emploi, Paris, Association des Ages, 1978, pp. 520-530), on peut s’intéresser notamment aux travaux d’Olivier Galland ou, plus récemment, au numéro 51 de la Revue des Sciences Sociales intitulée « La préadolescence existe-t-elle ? », dirigé par Nicoletta Diaso et Virginie Vinel, 2014.

[5] On peut rapprocher ces liens communautaires évoqués dans l’ouvrage au regard de la notion de capital d’autochtonie développé dans les travaux de Nicolas Renahy, notamment dans son ouvrage: Les Gars du coin, Nicolas Renahy, La découverte, 2005.

[6] À travers cette enquête qui s’intéresse simultanément à différentes scènes sociales, on comprend que l’évaluation extra-scolaire se fonde sur une hiérarchie interne (produite par des jugements divers) qui s’avère aussi intense pour ces jeunes élèves que l’évaluation scolaire (produite sur la base de résultats).

 


Compte rendu de l'ouvrage "Je hais le football" (Claude Javeau), Réveillé Jonathan:

(http://lectures.revues.org/18038)

 

Dans ce petit livre, le sociologue Claude Javeau revient sur les moments d’hystérie collective auxquels il a pu assister à l’occasion de la dernière édition de la Coupe du Monde de football organisée au Brésil. De nationalité belge, l’auteur retrace cet événement planétaire à travers l’épopée sportive et médiatique de l’équipe nationale belge de football, éliminée en quart de finale de la compétition. Sur le plan théorique, l’auteur s’inscrit dans « les voies d’une sociologie critique du sport[1] » (p.7) et propose ainsi une analyse totale du phénomène. Le livre se compose de 4 parties développant chacune une dimension particulière de l’objet football.

 

Pour commencer, Claude Javeau introduit sa réflexion sociologique par un étonnement. L’auteur, « d’ordinaire étranger au monde du sport, et à celui du foot en particulier » (p.16), cherche en effet à comprendre l’engouement pour ce sport de la part de personnes issues de « divers horizons sociaux » (p.6). Engouement de la part des aficionados, des intellectuels, des journalistes mais aussi – fait qui semble surprendre l’auteur - de la part d’un public profane, composé de « citoyens peu habitués des stades » (p.14), dépassant ainsi largement le cercle restreint des fidèles supporters.

 

L’auteur propose d’aborder le football en tant qu’« objet privilégié du spectacle » (p.14). Dans ce cas, la notion de spectacle doit être comprise à la fois comme condition de l’expansion mercantile du sport et comme vecteur de diffusion de l’idéologie dominante qui la sous-tend, le libéralisme. Parfaitement intégré à l’économie capitaliste, le football de « haut niveau » (p.14) en constitue également une vitrine d’exposition à l’échelle mondiale. L’auteur souligne alors le rôle essentiel des médias qui diffusent abondamment les exploits des stars du ballon rond et leur réussite matérielle. En contrepoint, l’auteur évoque les ravages du « brazilian way of life »[2] chez les jeunes garçons des pays sous-développés et l’exploitation des talents qui s’y organise. Ce « mirage de réussite personnelle » (p.20), qui appelle à se concrétiser en Europe, continue à faire de ce sport le lieu de projection d’un avenir idéalisé pour les joueurs (et leur famille) issus des classes populaires du monde entier[3]. Claude Javeau considère le football comme un « objet de croyance » universel, reprenant à plusieurs reprises les expressions « première religion mondiale » (p.18) et « nouvel opium du peuple » (p.48).

 

Davantage qu’un engouement passager, l’auteur observe que le football provoque de véritables injonctions collectives à travers une emprise diffuse des « médias », des « rumeurs » ou des « réseaux sociaux » (p.25). Pour l’auteur, ces conduites collectives doivent être analysées en tant que phénomène de masse, soustrayant l’homme à toute logique d’action individuelle ; ce dernier devenant lui aussi, au même titre que les acteurs sur le terrain, un objet du spectacle parmi d’autres. Cette analyse paraît exagérée mais se trouve accréditée si on cite des exemples régulièrement observés qui mériterait d’être étudiés précisément : le fait de parler du public d’un stade comme d’un « douzième homme » en rassemblant ainsi sous une seule entité des milliers d’individu, l’erreur (humaine) qui est de plus en plus contestée dans l’arbitrage, le découpage/montage du match télévisé qui restreint la lecture du jeu par le spectateur derrière son écran[4]

 

Adoptant parfois un style polémique, Claude Javeau évite toutefois de ne pas reprendre les éléments de langage critique, empreints de connotations morales (« football business », « manque d’amour du maillot », « caïds de banlieue », « racailles ») que l’on peut communément retrouver dans la presse sportive. Pour un sociologue, s’intéresser au football implique en effet de s’exprimer parmi d’autres discours, mieux diffusés et surtout mieux entendus auprès du public d’aficionados. Certains sociologues, à l’image de Stéphane Beaud, proposent donc une analyse alternative des événements ayant trait à ce sport, concurrençant ainsi les journalistes qui prétendent au « monopole de l’interprétation des choses du football »[5]. Claude Javeau procède différemment : il reprend ces discours et les intègre à son analyse globale du phénomène. Deux figures sont alors évoquées et constituent la cible privilégiée de l’auteur. D’un côté, les « journalistes sportifs » (p.22) optant pour un ton glorifiant, laissant ainsi de côté le scandale, sauf si celui-ci s’avère « impossible à passer sous silence » (p.34). De l’autre côté, les intellectuels-aficionados, attribuant les méfaits de ce sport (corruption, dopage, esclavage) aux seules dérives financières, ce qui leur vaut d’être qualifiés d’« idiots utiles » (p.22) par l’auteur. Claude Javeau réfute en effet ce type d’analyse formulé en termes de dérives, cherchant à séparer le bon grain du football « qui possèderait une essence pure » (p.34) de l’ivraie capitaliste et monétaire « dont il ne serait pas impossible de se défaire » (p.47). En cela, il défend une thèse centrale de la sociologie critique du sport qui consiste à dire que le football, en tant qu’élément du mode de production sportif, est entièrement subordonné au mode de production capitaliste l’ayant engendré. Pour l’auteur, la face négative du football, bien que dissimulée dans « la mise en spectacle par les médias » (p.46), s’avère « intrinsèque à ce sport » (p.21).

 

Le premier texte de l’ouvrage (« Du football en général ») accrédite cette thèse. Dans la présentation de l’objet, Claude Javeau associe de façon très pertinente une série de remarques générales sur ce sport - ses règles, son jeu, son histoire - et les raisons de sa généralisation à l’échelle planétaire. De plus, l’auteur met en avant la duplicité des caractéristiques fondatrices du football-association (jeu/spectacle, fair-play/agressivité, ludique/sportif) dès l’origine de sa codification par les élites londoniennes en 1963[6]. Pour lui, son expansion planétaire et sa transformation en pur spectacle a détruit progressivement la dimension ludique de la pratique au détriment du « jeu sportif » (p.12) lui-même. En parallèle, l’agressivité, consubstantielle au sport, déborde fréquemment les contraintes institutionnelles du jeu – essentiellement définies par l’arbitrage - pour se déplacer finalement dans les gradins « au profit de divers avatars » (p.12) tel que le chauvinisme.

 

C’est précisément cette « exaltation chauvine des supporters » (p.14) dont il est question dans le texte, intitulé « Les Diables Rouges au secours du Royaume de Belgique ». Ce passage constitue la clé de voûte de livre et permet à l’auteur d’illustrer ses propos à travers un exemple récent. Dans cette analyse, le sociologue met en évidence la conjonction « d’une passion collective pour un sport capable de captiver les masses et d’un Etat déliquescent, que cette passion devait ranimer » (p.14). Autrement dit, Claude Javeau montre comment la partition communautaire qui se joue actuellement en Belgique entre la Flandre et la Wallonie (et les velléités autonomistes qui la reflètent) a contraint les communicants à employer « des moyens considérables » (p.28) afin de créer une adhésion du public autour de l’équipe nationale (sélectionneur bilingue, joueurs de niveau mondial, campagnes publicitaires de grande envergure, etc…) soutenue jusqu’ici que de façon ponctuelle. Pour le lecteur français, cette description de l’événement fera sans doute écho au parcours de l’équipe de France de football à la Coupe du Monde en 1998 à propos de laquelle on retrouve de nombreux points communs. En effet, sortis victorieux de la compétition, les « Bleus » avaient également fait l’objet à l’époque d’une « projection nationale disproportionnée[7] » dans une France « Black-Blanc-Beur » censé exprimer l’unité du pays dans sa diversité.

 

Dans cette partie, le portrait qui est fait de Vincent Kompany, capitaine de la sélection belge de football, incarne de façon significative les analyses développées dans l’ouvrage. Ce dernier, footballeur belge d’origine congolaise, évoluant dans le club anglais de Manchester City (dont le président actuel est un homme d’affaire émirati) officie par ailleurs en tant que « partenaire » d’une société audio-visuelle qui a produit un documentaire intime (prenant ici la forme singulière d’un auto-plébiscite) retraçant la qualification des Diables Rouges à la dernière Coupe du Monde. D’une certaine manière, Vincent Kompany synthétise à lui seul toutes les ambiguïtés de l’équipe nationale en principe « au secours du royaume de Belgique » mais en réalité au service de Coca-Cola, remettant ainsi en question la représentativité de ces joueurs.

 

Pour finir, on peut dire que l’ouvrage développe des pistes très stimulantes et constitue une première approche intéressante pour le lecteur qui cherche à en connaître un peu plus sur la dimension politique du football ou encore l’étudiant en sociologie qui souhaite aborder les thèses de la sociologie critique du sport. On regrette cependant que l’auteur ne s’intéresse pas davantage au football en tant « pratique effective sur les terrains » (p.6). On sait pourtant qu’une inflation des moyens financiers dans le football peut exercer une influence néfaste sur le spectacle proposé[8] et le jeu lui-même. C’est d’ailleurs ce qui explique qu’une grande partie des pratiquants du football, en tant qu’initiés à une culture populaire qui constitue encore un lieu privilégié de transmission générationnelle[9], sont aptes à formuler une critique lucide de leur sport favori. A leur manière, ces supporters-pratiquants constituent un frein à l’extension du football[10] au domaine marchand et auraient mérité pour cela d’être mentionnés.

 

22 Mai 2015

Réveillé Jonathan

reveille.jonathan@gmail.com



[1] Pour approfondir la question, on peut lire : Brohm Jean-Marie, « Sociologie critique et critique de la sociologie », Education et sociétés, 2004/1 n°13, p. 71-84 ; Le football, une peste émotionnelle, Jean-Marie Brohm, Marc Perelman, Gallimard, 2006 (ouvrage cité par Claude Javeau).

[2] Futebol : The Brazilian Way of Life, Alex Bellos, Bloomsbury Publishing PLC, 2002.

[3] « “Tu Seras Pelé, Maradona, Zidane” ou… Rien », Le Monde Diplomatique, juin 2006.

[4] Le match de football télévisé, Jacques Blocisewski, Apogée, 2007.

[5] Affreux, riches et méchants, un autre regard sur les Bleus, Stéphane Beaud (avec Philippe Guimard), La Découverte, 2014, p.10. Pour un compte-rendu de cet ouvrage, voir : Jacques Moriau, « Stéphane Beaud, Affreux, riches et méchants ? Un autre regard sur les Bleus », Lectures [En ligne], Les comptes rendus, 2014, mis en ligne le 05 août 2014, consulté le 14 mai 2015. URL : http://lectures.revues.org/15226

[6] Pour un aperçu historique de la question, on peut lire : Histoire du football, Paul Dietschy, Tempus Perrin, 2014.

[7] Sur le football comme projection nationale, on peut se reporter à l’entretien de Stéphane Beaud accordé à Médiapart en 2011, [En ligne], consulté le 14 Mai 2015, URL : http://www.mediapart.fr/journal/france/080411/les-bleus-sont-le-lieu-dune-projection-nationale disproportionnee.

[8] Quel avenir pour le football ?, objectif 0-0, Gaël Raballand, Sylvain Cianferani, Jean-François Marteau, L’Harmattan, 2010.

[10] C’est pourquoi d’autres avatars plus rentables tels que la groupie, le footix ou le supporter ironique (rassemblés sous l’appellation de « nouveaux supporters ») sont mis en avant par les médias de la même façon que le public profane dont l’auteur constate avec étonnement la ferveur à l’occasion des grands événements sportifs.

 

Cécile Rabot, La construction de la visibilité littéraire en bibliothèque

Jonathan Réveillé

Sociologue

29/07/2015

À la fois original et ambitieux, le travail de Cécile Rabot se construit à partir d’une « enquête sur le long cours » (p.17) effectuée au sein du réseau des bibliothèques de la Ville de Paris dans le cadre de sa thèse de sociologie. Dans cet ouvrage, Cécile Rabot nous propose d’analyser les enjeux liés à la valorisation des collections et à l’action culturelle menée en bibliothèque de lecture publique. À travers cette « boite noire peu interrogée » (p.13), l’auteure s’intéresse en effet à ce qui constitue le cœur de métier des bibliothécaires, à savoir « proposer des sélections raisonnées » (p.67) aux lecteurs indécis - ou prétendus comme tels - rassemblés sous la catégorie générique de « grand public[1] ».

Afin de mieux appréhender ces actions de mise en visibilité des ouvrages, l’auteur propose de s’intéresser à quatre principaux dispositifs de valorisation : les « Coups de Cœur », les « Nouveautés », les « Premiers romans », les « Mordus du polar »[2]. Ces dispositifs se structurent par des oppositions très marquées mais néanmoins complémentaires (lien avec l’activité éditoriale vs mise en valeur de fonds déjà constitués ; valeurs sûres vs objets moins connus, etc…), s’inscrivant ainsi dans ce que l’auteur propose d’appeler un « continuum » (p.21) qui va du pôle hétéronome au pôle autonome, reproduisant ainsi la structure du champ littéraire située selon Pierre Bourdieu[3] entre un pôle de production restreinte autonome vis-à-vis des contraintes économiques et un pôle de grande production dépendant des logiques de marché.

En tant qu’établissements culturels les plus fréquentés de France, les bibliothèques constituent un acteur essentiel de la démocratisation culturelle[4] qui passe précisément par la « médiation » (p.65) et le fait de « promouvoir la qualité tout en touchant un maximum de public » (p.362). Dans le même temps, les bibliothèques de lecture publique se situent au croisement entre l’actualité éphémère et le succès médiatique d’un côté et le temps long de l’histoire littéraire de l’autre côté. A bien des égards, cette posture « moyenne » occupée par les bibliothèques de lectures publiques parmi les instances de légitimation littéraire se reflète dans les choix d’ouvrages rendus visibles par les bibliothécaires.

L’auteure met en relation deux notions : la notion de visibilité d’une part, initialement développée par Nathalie Heinich, notamment dans ses travaux sur la célébrité[5], et la notion de démocratisation culturelle d’autre part, qui consiste à « favoriser la rencontre entre l’offre et le public » (p.11). Pour l’auteure, le cœur du métier de bibliothécaire se définit actuellement à travers ces deux notions et se traduit par exemple dans la mise en visibilité (quand cela est possible) d’ouvrages parus chez des petits éditeurs et ne bénéficiant pas d’un autre espace de diffusion. On comprend donc que ce travail de mise en visibilité opéré par les bibliothécaires participe d’un « savoir-faire non formalisé » (p.13) essentiel dans la compréhension de ce métier et des enjeux qui le traversent.

La richesse des matériaux Cécile Rabot lui permet d’analyser avec finesse la complexité des manières de rendre compte auprès du public des acquisitions du réseau des bibliothèques de la Ville de Paris. En plus des listes complètes des ouvrages sélectionnés selon les dispositifs, l’auteure a pu en effet assister à des séances de travail de sélection et obtenir les comptes rendus de réunion archivés afin de mieux saisir les logiques et les enjeux qui définissent l’espaces des choix d’ouvrages possibles selon les dispositifs. Paradoxalement, on remarque que certains dispositifs de mise en valeur suscitent un faible engouement du côté des bibliothécaires notamment le dispositif « Nouveautés » qui consiste de fait à mettre en avant les productions les plus proches du pôle de grande production dans la structure du champ littéraire. Dans ce dispositif, le travail critique de première main des bibliothécaires qu’il considère pourtant comme constitutif de leur métier est impossible à effectuer. Il consiste en effet à sélectionner des ouvrages dans « une procédure d’achat accélérée et systématique » (p.21) conduisant par conséquent à s’en remettre aux indices restreints disponibles au moment de la procédure d’achat (nom de l’auteur, couverture, quatrième de couverture, résumé) ; cette dernière ayant lieu avant la date de sortie des ouvrages en librairie. De ce fait, les bibliothécaires chargés des sélections misent donc plutôt sur des valeurs sûres permettant de réduire le risque d’une expérience déceptive pour le lecteur. Les ouvrages à grands tirages et les auteurs connus et reconnus seront davantage mis en avant dans les présentoirs, développant ainsi une culture « moyenne » (p.329) et omnibus dans ces espaces, à rebours des notions d’originalité et de diversité mises en avant par les bibliothèques de lecture publique. Proposant une analyse fine et nuancée, Cécile Rabot démontre que ces présentoirs, loin d’être seulement résultat d’une logique hétéronome, recouvre également une dimension stratégique.

En effet, Cécile Rabot fait remarquer que cette mise en valeur des best-sellers, jouant sur « des effets d’écho et de reconnaissance » (p.361) et laissant finalement peu de place à l’inconnu et à la découverte, permet néanmoins de composer avec les exigences des tutelles en termes de taux de rotation et de taux d’emprunt des ouvrages autorisant ainsi l’entretien de fonds plus confidentiels. Par ailleurs, le fait d’inviter les lecteurs à « circuler dans l’ensemble des ouvrages publiés sous un même nom » (p.237) correspond à la vision « auctoriale » que portent les bibliothécaires sur la production littéraire, et se prête aisément à ce type de dispositif (le dernier Mary Higgins Clark, le dernier Marc Levy, etc.). Dans l’ensemble, le dispositif « Nouveautés » et dans une moindre mesure les « Coups de Cœur » contribuent à renforcer la visibilité pour des ouvrages ayant déjà acquis une renommée par ailleurs (reconnaissance de la presse, prix littéraire, succès de librairie) : ici, la bibliothèque en tant qu’institution occupe alors un rôle dominé dans le champ littéraire. A ce propos, l’auteur montre bien, à l’appui de tableaux statistiques, comment le dispositif « Coup de Cœur » se construit très souvent à partir d’œuvres « secondaires » d’auteurs mis en avant par ailleurs dans le dispositif « Nouveautés ». Mais le fait de donner du crédit à un dispositif qui choisit de mettre en avant une sélection hétéronome engage aussi l’image de la bibliothèque et permet de s’ajuster à la demande du « grand public ».

Par ailleurs, la bibliothèque de lecture publique doit également, selon Cécile Rabot, « constamment tenir ensemble différents enjeux » (p.362) et jouer aussi le rôle de « découvreurs-passeurs » (p.217). En effet, à l’opposé du pôle hétéronome décrit ci-dessus, l’opération « Premier roman » constitue un exemple intéressant de mise en valorisation dans le pôle autonome. En effet, dans ce type d’opération, la trentaine de bibliothécaires mobilisés va réaliser une lecture de première main d’ouvrages à travers lesquelles ils construisent « leur identité professionnelle de critique et d’acteur du champ littéraire » (p.212). Plus largement, en analysant l’opération « Premiers Romans », c’est l’ensemble des « petits profits symboliques réciproques » entre acteurs dominés du champ littéraire dont il est question ici. En étant ainsi attentif à l’émergence de nouveaux talents, Cécile Rabot fait remarquer en effet qu’ils participent non seulement à la légitimation des écrivains en devenir mais qu’ils participent aussi en retour « à la définition du droit d’entrée dans le champ littéraire » (p.207). Une telle opération est aussi révélatrice des oppositions structurant deux mondes professionnels distincts, l’école et la bibliothèque, qui s’expriment dans les différentes représentations de la lecture mais aussi dans les trajectoires de bibliothécaires qui entretiennent un rapport distant et ambigu à l’école, s’illustrant par exemple à travers l’emploi du mot « littéraire », utilisé (avec prudence) à la fois positivement comme « une marque de valeur » et négativement comme relevant d’une tradition lettrée susceptible de « décourager les lecteurs profanes » (p.304).

En conclusion, le travail de Cécile Rabot se distingue par la profondeur de ses analyses et la variété de ses données de première main égrenées pertinemment tout au long du texte. Il semble s’appuyer également sur une solide culture littéraire qui lui a sans doute permis de rendre possible la « proximité d’habitus entre enquêtés et enquêtrice » (p.24) que l’on observe tout le long du texte. À la manière des grandes enquêtes de terrain qui démontrent la puissance de l’analyse sociologique[6], son ouvrage – difficile à synthétiser du fait de la densité du propos - contribue de façon exemplaire à la compréhension d’un petit monde professionnel ; en l’occurrence ici, les bibliothécaires du réseau de la Ville de Paris. Si ce texte représente un intérêt évident pour la sociologie des professions du livre et la sociologie des pratiques culturelles[7], il participe également à la « visibilité » et à la légitimation du métier de bibliothécaire, « rouage à part entière du champ littéraire » (p.365). Pourtant, l’identité professionnelle de ces derniers reste menacée de dégradation du fait de la rationalisation des politiques publiques qui, « en donnant le primat à l’audience » des services de documentation, négligent la part de sélection et de conseil qu’implique le métier et réduisent par conséquent les conditions de possibilité de démocratisation culturelle. Par ailleurs et afin de nuancer la catégorie de « grand public » souvent rencontré dans les entretiens avec des professionnels du livre, il aurait sans doute été intéressant d’illustrer les analyses (déjà très riches !) par des portraits de lecteurs qui, comme le suggère précisément l’auteure, s’insèrent dans des trajectoires d’usagers qui peuvent « s’infléchir sur le long cours » (p.368) et permettre ainsi de saisir le travail de mise en visibilité des bibliothécaires sur une temporalité plus longue, sans doute plus judicieuse pour rendre compte de sa pertinence.

 



[1] Dans le discours de certains bibliothécaires, à côté de cette catégorie « grand public », on retrouve aussi la figure de l’usager idéal qui chercherait à faire des découvertes hors des sentiers battus et qui serait disposé à entendre les conseils de lecture qui lui sont adressés.

[2] On peut distinguer les dispositifs « Nouveautés » et « Coups de Cœur » d’une part, pensés pour toucher un large public et les dispositifs et de ce fait les plus proches du pôle hétéronome. Pour l’auteur, le dispositif « Coup de Cœur » permet aux bibliothécaires de jouer « leur rôle traditionnel de prescripteur » (p.309) tout en s’en défendant au nom de la subjectivité que suggère l’intitulé du dispositif. Les dispositifs « Premiers Romans » et « Mordus du Polar » d’autre part, deux prix qui visent à récompenser respectivement un jeune auteur de romans et un auteur de roman policier s’adressant à un public adolescent.

[3] Pierre Bourdieu, Les règles de l’art : genèse et structure du champ littéraire, Seuil, 1998.

[4] Cécile Rabot précise qu’un changement de tutelle ministérielle intervient pour les bibliothèques de lecture publique en 1975 : à partir cette année, elles ont dépendu du secrétariat d’État à la Culture et non plus du Ministère de l’Éducation Nationale.

[5] Nathalie Heinich, De la visibilité : excellence et singularité en régime médiatique, Gallimard, 2012.

[6] « L’enquête, sous toutes ses formes, est bel et bien l’arme décisive de la sociologie. », écrit Christian Baudelot dans sa note critique à propos de l’ouvrage de Christelle Avril sur les aides à domicile : https://lectures.revues.org/15069

[7] Comme le suggère Cécile Rabot, on peut également mettre en lien ces analyses avec l’étude d’autres domaines très différents tels que le travail de mise en rayon des produits en grande surface ou le tourisme. En ce qui concerne le cas du tourisme, on pense notamment les travaux de Rachid Amirou sur l’imaginaire touristique et la dialectique connu/inconnu qui le structure. Sur ce point on peut se reporter à son ouvrage : Rachid Amirou, Imaginaire et sociabilités touristiques, Presses universitaires de France, 1995.